Fiche expert Maladies sur gazon : l'alternative biologique
La protection biologique des gazons repose sur le pilotage des équilibres naturels. Elle nécessite de raisonner en mode préventif et non pas curatif.
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L'approbation de l'Iprodione au titre du règlement n° 1107/2009 a été retirée en décembre 2017. Cette substance active n'étant plus autorisée, les produits phytopharmaceutiques à base d'Iprodione ont été retirés du marché en mars dernier. La date limite de vente, de distribution et d'utilisation des stocks des produits concernés est fixée au 5 juin prochain. Cette substance active fongicide à large spectre ciblait de nombreux bioagresseurs fongiques des gazons, tels que Microdochium nivale (fusariose froide), Sclerotinia homoeocarpa (dollar spot), Laetisaria fuciformis (fil rouge), Colletotrichum graminicola (anthracnose), Fusarium roseum (fusariose estivale), helminthosporiose, etc. Des alternatives biologiques existent. Elles doivent être utilisées en préventif, dans le cadre de programmes de protection travaillés avec les gestionnaires d'espaces verts et s'intègrent dans une gestion globale axéesur la prophylaxie et l'agronomie.
Principaux bioagresseursfongiques des gazons
Plusieurs pathogènes affectent lesgazons en France. Le Pythium, très problématique en été, est très fréquent sur l'Hexagone. Il affectionne les périodes chaudes et humides. L'anthracnose, plus fréquente sur terrains de sport que sur golfs, sévit toute l'année mais devient très néfaste de l'été à la fin de l'hiver.Le dollar spot reste en dormance et se révèle lorsque les températures dépassent les 16 °C, avec des nuits douces et humides de mai à fin octobre en général. Sclerotium rolfsii apparaît plutôt sur les terrains de sport après des périodes très chaudes pendant plusieurs jours au-dessus de 30 °C ; l'an dernier, la pression a été très forte et il y a eu de gros dégâts. Lafusariose hivernale intervient à partird'octobre jusqu'à mars sur toute la France.
La clef de voûte prophylactique
Opter pour une protection naturelle du gazon passe avant tout par un retour aux basiques de l'agronomie. Travailler sa fertilisation de façon soignée et régulière, opter pour une bonne aération du sol avec sablage, décompactage, défeutrage sont des conditions sine qua none. L'irrigation doit être qualitative, notamment en investissant dans un système d'arrosage optimisé, évitant tout phénomène de « dry patch », fréquent en sol sableux. Investir dans un bon système d'arrosage, programmable, à double recouvrement garantit une couverture homogène. Débit, pression, qualité des buses sont des critères à contrôler régulièrement. Il convient également d'être attentif aux apports raisonnés en azote pour une croissance modérée du gazon, d'effectuer des roulages après la tonte, de limiter le taux de matière organique dans la partie proche du collet ou encore le tassement du sol. Relever la hauteur de tonte peut aussi freiner le développement des pathogènes. Plus spécifiquement, sur terrains de sport et golfs, le dollar spot est favorisé par la forte présence de pâturin annuel, monocotylédone très sensible à cette maladie. Enfin, dans le cas où un traitement phytosanitaire chimique est requis, il est essentiel d'alterner au mieux les matières activespour limiter les résistances du pathogène.
Différents modes d'action
Le biocontrôle est basé sur la connaissance puis l'utilisation de solutions inspirées de la nature. Ciblant les pathogènes du sol, il est logique de se préoccuper des alliés (Trichoderma spp, Glomus spp, nématodes entomopathogènes...) présents dans le sol. Ainsi, Trichoderma, champignon antagoniste présent dans la rhizosphère, dit utile ou auxiliaire, opère par différents modes d'action. Il agit par antibiose en inhibant la croissance de l'agent pathogène. Il entre en compétition spatiale avec les champignons pathogènes du sol, formant un manchon protecteur autour des racines en phase de croissance et occupant la rhizosphère. C'est aussi un compétiteur nutritionnel. En effet, les racines sécrètent des exsudats racinaires, principales sources de carbone et d'azote de la rhizosphère, favorisant le développement pathogènes. Installé en préventif, Trichoderma est le premier en place pour pomper ces ressources nutritives, n'en laissant peu ou pas aux pathogènes nuisibles aux plantes. Cet antagoniste a aussi la capacité de perforer les hyphes du pathogène avec lequel il entre en contact. Une attaque directe qu'on appelle mycoparasitisme. Enfin, il stimule la réaction de défense des plantes, favorise la croissance racinaire etaérienne, et améliore la solubilisation des éléments minéraux du sol.
Exemple d'une stratégieglobale préventive
Une solution alternative de protection des racines du gazon consiste à combiner Trichoderma harzianum et un biostimulant tout en mettant en oeuvre les bonnes pratiques agronomiques citées précédemment. Le biostimulant favorise l'émergence de nouvelles radicelles, et donc l'augmentation de la surface à coloniser pour Trichoderma harzianum. Cette stratégie globale est préventive : le champignon auxiliaire doit prendrela place avant l'arrivée des pathogènes et la conserver. Elle nécessite donc d'apporter tous les mois une population d'antagonistes bénéfiques au niveau des racines émergentes pour continuer à protéger ces dernières, tout en fortifiant legazon pour le rendre plus résistant aux attaques et aux stress.
2017 a été une forte année à dollar spot sur les golfs. Les greens traités avec ce programme « bonnes pratiques agronomiques/Trichoderma/biostimulant » ont été, de manière générale, épargnés par la virulence de la maladie, avec une bonne installation du champignon antagoniste, dans la continuité de 2016, et des interventions chimiques espacées et réduites.
Dans tous les cas, opter pour les biosolutions doit être mûrement réfléchi et préparé, car tous les critères prophylactiques prennent une importance fondamentale. Sans une bonne prophylaxie, pas de miracle à attendre des biosolutions.
En revanche, quand tout est intégré, la satisfaction est au rendez-vous pour les professionnels comme pour les usagers. De nombreuses recherches sont actuellement en cours pour apporter de nouvelles clefs dans cette gestion écorespon-sable des gazons.n
Par Adrien Lauberton, conseiller technico-commercial JEVI (Jardins, espaces végétalisés et infrastructures), Koppert (84)
Sur les golfs, 2017 a été une forte année à dollar spot. Pour faire face à la disparition des solutions de lutte chimiques, comme l'iprodione, il est possible de mettre en place une stratégie globale reposant sur la mise en oeuvre de bonnes pratiques agronomiques, et l'utilisation d'une solutionde biocontrôle associéeà un biostimulant. PHOTO : KOPPERT
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